vendredi 31 octobre 2008

Villers



Dans le cloître abandonné
Les fougères sont venues prier
Dans la pénombre herbeuse de l'abandon
Où les ombres du passé passent peut-être

Les piliers touchent enfin le ciel 
Et les dalles sont cousues de racines 
Qui les maintiennent au sol
Pour qu'elles ne disparaissent pas

Sous les voûtes  transparentes de midi
Si l'on chante un tropaire oriental
La voix résonne et revient vers l'âme
Comme pour ne laisser au silence nulle trace

Les yeux ne voient que la ruine du temps
Mais l'imagination fertile et tendre
Imagine doucement l'aube monastique
Et ses offices qui s'agrippent au cieux

Or donc dans l'oraison du silence qui domine
Avec l'encens léger de la brume
Et la végétation des murs comme une foule verte
L'or de l'automne promet ses richesses 

Dans le cloître abandonné
Les fougères sont venues prier
Dans la pénombre herbeuse de l'abandon
Où les ombres du passé passent peut-être


Claude Lopez-Ginisty: L'autre versant de la Vie
Photo: Abbaye de Villers , Belgique ( auteur)

samedi 25 octobre 2008

Le vent s'est vêtu de corbeaux



Le vent s'est vêtu de corbeaux
Sur les nuages qui moutonnent
Il fait frissonner les ruisseaux
Et briller ses ors monotones

Il n'est forêts bois ni coteaux
Qui au sommeil ne s'abandonnent
Le vent s'est vêtu de corbeaux

Nuages qui tombent en eaux
Feuilles qui volent et s'étonnent
Crissant sous les pas qui résonnent
Les jours s'estompent en lambeaux
Le vent s'est vêtu de corbeaux

Claude Lopez-Ginisty
Le Jour de Charles d'Orléans 

Photo: 
Automne au Creux de Charpigny (auteur)

lundi 13 octobre 2008

Mélancolie




Mélancolie 
Aux yeux de suie
Quand le chagrin
Ouvre sa main

Un poète oublié
Au fond d'une mansarde
Ecoute en lui chanter
Un souvenir maussade

Mélancolie
Aux lèvres nuit
Dans le baisier
D'un seul été

Sur la grêve d'un port
Un enfant tout en noir
Qui regarde le bord
Et s'en va dans le soir

Mélancolie 
Aux cheveux gris
Quand le soleil
Ferme le ciel

Au front doux des ruisseaux
Le violon du silence
Grince à tous les échos
Une étrange romance

Mélancolie
Aux pieds de pluie
Quand le matin
Pleure au jardin

Sur le lit un grand corps
La main sur une rose
Et des poèmes morts
Entre ses lèvres closes

Mélancolie
Comme une amie
La valse meurt
Au fond d'un cœur

Et la main qui écrit
Un poème nuage
En partant dans la nuit
Pour un autre rivage

Claude Lopez-Ginisty: Rhapsodie Somniloque
Tableau:Dürer Mélancholia

samedi 11 octobre 2008

Vêpres


Voici le temps de la journée
où la vie se calme autour de moi
comme la dernière vague
vient en gémissant de sa langue d’écume
dire au sable le sommeil de la houle

et je suis dans l’océan de Ton Amour
le minuscule grain de sable
humide soudain
dans la foule de la plage
avant Ton baiser de soleil
qui me dorera au matin neuf

Et Tu peux m’emporter quand Tu le veux
pour me mêler joliment dans Ton océan d’Amour
au corail de Ton Verbe à jamais

Claude Lopez-Ginisty: En attendant la Parousie
Photo: Lutrin/ Livre/ Lestovka/ Tchotki

vendredi 10 octobre 2008

Transparence


Les autres
Sont aussi
Ce que je sais
De moi

Claude Lopez-Ginisty: En attendant la Parousie
Photo: Fleurs Folles du Courtil ( Auteur)

lundi 6 octobre 2008

Le cœur marin







Photo prise face à la mer sur une plage chilienne

J’ai tant chanté la mer
Aux marées d’équinoxe
Que je garde en mon cœur
Les vagues de sa voix

Et quand descend le soir
Comme un reflux magique
Leur nostalgie remonte
Jusqu’au port de mon âme

Mais j’ai le cœur marin
Je ne crains les tempêtes
Mes amours sont des mouettes
Qui me suivent au loin

Et si parfois je pleure
C’est pour un vieux soleil
Qui brillait sur la plage
Où je t’ai rencontrée

J’ai tant rêvé la mer
Aux lunes d’équinoxe
Que mon cœur parfois casse
Et reste à marée basse.

Claude Lopez-Ginisty: Le livre de sable et de soleil

jeudi 2 octobre 2008

Chanson pour Pierrot


Partition de Au clair de la lune.

Qu'une étoile soit un falot
Au sombre d'une pleine lune
L'albe tristesse de Pierrot
Fait de ses pleurs une lagune

Et la Mer de Sérénité
Garde sa fille Colombine
Il faut décrocher un été
Dans septembre qui meurt de bruine

Les soupirs font une oraison
A l'amour pâle de Pierrot
Il faut se faire une raison
Déjà il épargne un sanglot

Et il repart les yeux au sol
La si do ré mi Colombine
Est un diapason un peu fol
Pour un cœur qui meurt en sourdine

Claude Lopez-Ginisty: Chansons

mercredi 1 octobre 2008

Kitège



Par temps de nostalgie
lorsque les yeux se perdent dans le rêve

Au pâle soleil de septembre
Au bord de l'eau comme une larme
Que retiendrait la rive moussue
D'un lac d'où s'élève le voile tendre
D'une brume vaporeuse

Kitège vacille
Apparaît 
Disparaît

Sous l'onde des souvenirs
Un de ses clochers sonne
Un glas de plusieurs siècles
Ou l'annonce d'une fête
Dans l'éternité

Mais le regard se brouille
Le lac n'est plus qu'un lac
Et la berge herbeuse
A cousu le paysage d'un ourlet vert
Qui l'attache au présent

Kitège reprend son exil
Dans la mémoire fragile
Des jours nostalgiques
Où la réalité touche au ciel
Et soulève la terre des vivants
Jusques aux portes sublimes du Royaume


Claude Lopez-Ginisty: Le livre de sable et de soleil
Tableau: Mikhail Vasilievitch NESTEROV: La Vision du Jeune Barthélémy