vendredi 18 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 180...


CLXXX
Le soleil me salue d'un sourire,
La pluie, sa triste sœur, parle à mon cœur.

CLXXXI
Ma fleur du jour fit tomber ses pétales dans l'oubli.
Dans la soirée, elle mûrit en ce fruit doré du souvenir.

CLXXXII
Je suis comme la route de la nuit écoutant dans le silence les bruits de pas de ses souvenirs.

CLXXXIII
Le ciel du soir est pour moi une fenêtre, une lampe allumée et l'attente sous sa clarté.

CLXXXIV
Celui qui est trop occupé à faire le bien, ne trouve pas le temps d'être bon.

CLXXXV
Je suis le nuage automnal, vidée de sa pluie, voyez ma plénitude dans le champ de riz mûr.

CLXXXVI
Ils haïrent et tuèrent, et les hommes les ont loués.
Mais Dieu, de honte, se hâte de cacher ce souvenir sous l'herbe verte.

CLXXXVII
Les orteils sont des doigts qui ont oublié leur passé.

CLXXXVIII
La ténèbre voyage vers la lumière, mais l'aveuglement se dirige vers la mort.

CLXXXIX
Le chien domestique suspecte l'univers de projeter de lui prendre sa place.

CLXC
Reste calme, ô mon cœur, ne soulève pas ta poussière.
Laisse le monde trouver son chemin jusques en toi.

CLXCI
Avant que celle-ci ne s'élance, l'arc murmure à la flèche: " ta liberté est la mienne."

CLXCII
Femme, dans ton rire tu as la musique de la fontaine de vie.

CLCIII
Un esprit qui n'est que logique est comme un couteau constitué seulement d'une lame.
Il fait saigner la main qui l'utilise.

Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)

jeudi 17 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 169-179



CLXIX
La pensée se nourrit de ses propres mots et grandit.


CLXX
J'ai plongé la coupe de mon cœur dans cette heure silencieuse, il s'est rempli d'amour.

CLXXI
Soit vous avez une tâche, soit vous n'en avez point.
Lorsque vous devez dire " faisons quelque chose, " alors commence le mal.

CLXXII

Le tournesol rougissait de devoir reconnaître la fleur anonyme comme sa parente.
Le soleil se leva, lui sourit en disant:" Comment vas-tu mon amour?"

CLXXIII
" Qui me conduit en avant comme le destin?"
" Le Moi qui chevauche mon dos."

CLXXIV
Les nuages remplissent les coupes de la rivière, en se cachant dans les collines lointaines.

CLXXV
Je renverse l'eau de ma jarre tandis que je marche.
Très peu en reste pour mon logis.

CLXXVI
L'eau dans une coupe étincelle, dans la mer, l'eau est sombre.
L'humble vérité a des paroles qui sont claires, la grande vérité possède un grand silence.

CLXXVII
Ton sourire était les fleurs de tes propres champs, ton parler était le bruissement de tes propres pins montagnards, mais ton cœur était cette femme que nous connaissons tous.

CLXXVIII
Ce sont de petites choses que je laisse à ceux que j'aime, les grandes sont pour tout le monde.

CLXXIX
Femme, tu as encerclé le cœur du monde dans la profondeur de tes larmes, comme la mer encercla la terre.

Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)



mercredi 16 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 159-168

CLIX
Quand nous nous réjouissons de notre plénitude, alors nous pouvons avec joie nous séparer de nos fruits.

CLX
Les gouttes de pluie embrassèrent la terre et murmurèrent : " ô Mère, nous sommes tes enfants nostalgiques, revenus vers toi depuis le ciel."

CLXI
La toile d'araignée prétend attraper des gouttes de rosée et elle attrape des mouches.

CLXII
AMOUR, quand tu viens avec la lampe brûlante du chagrin dans ta main, je puis voir ton visage et te considérer comme une bénédiction.

CLXIII
" Les savants disent que vos lumières ne seront plus un jour, " dir la luciole aux étoiles.
Les étoiles ne répondirent point.

CLXIV
Dans le crépuscule du soir, l'oiseau de quelque aurore matinale, vient au nid de mon silence.

CLXV
Les pensées passent dans mon esprit comme des vols de canards dans les cieux.
J'entends la voix de leurs ailes.

CLXVI
Le canal aime à penser que les rivières n'existent qu'à seule fin de lui fournir de l'eau.

CLXVII
Le monde a étreint mon âme avec sa peine, demandant des chansons en retour.


CLXVIII
Ce qui m'opprime, est-ce mon âme essayant de sortir à l'air libre, ou bien l'âme du monde frappant à mon cœur afin d'y entrer?

Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)




mardi 15 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 148-158


CXLVIII
Des brêches sont laissées dans la vie, à travers lesquelles sourd la triste musique de la mort.

CXLIX
Le monde a ouvert son cœur de lumière dans le matin.
O mon cœur, sors avec ton amour pour le rencontrer.


CL
Mon cœur scintille avec ces feuilles chatoyantes et mon cœur chante au contact de la lumière du soleil; ma vie se réjouit à flotter avec toute chose dans l'azur de l'espace et la noirceur des ténèbres.

CLI
Le grand pouvoir de Dieu est dans la douce brise, non dans la tempête.

CLII
Ceci est un rêve dans lequel les choses sont toutes éparpillées et oppressantes. Je les retrouverai unies en toi quand je m'éveillerai et je serai libéré.

CLIII
" Qui peut se charger de mes tâches?" demande le soleil levant.
" Je ferai ce que je peux, mon Maître," dit la lampe terrestre.

CLIV
En lui arranchant ses pétales, tu ne cueilles point la beauté de la fleur.

CLV
Le silence portera ta voix, comme le nid soutient les oiseaux endormis.

CLVI
Le Grand marche sans crainte avec le Petit.
Le Moyen se tient à distance.

CLVII
La nuit ouvre les fleurs en secrets et permets au jour d'en recevoir les remerciements.

CLVIII
Le pouvoir considère comme de l'ingratitude les cris de douleur de ses victimes.

Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)


lundi 14 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 137-147



CXXXVII
Tu élèves tes vagues en vain pour suivre ton amant, ô mer, épouse solitaire de l'orage.

CXXXVIII
" J'ai honte de mon vide," dit le Verbe à l'Œuvre.
" Je sais combien je suis pauvre quand je te vois, " dit l'Œuvre à la Parole.

CXXXIX
Le temps est la richesse du changement, mais l'horloge, dans sa parodie, en fait seulement changement et non richesse.

CXL
Habillé par les faits, la vérité se trouve à l'étroit.
Elle se meut avec plus d'aise dans la fiction.

CXLI
Quand je voyageais çà et là, j'étais las de toi ô route, mais à présent quand tu me conduis n'importe où, je fais avec toi un mariage d'amour.

CXLII
Laissez-moi croire que l'une de ces étoiles guide ma vie à travers les ténèbres de l'inconnu.

CXLIII
Femme, aec la grâce de tes doits, tu touchas mon désordre et l'ordre en sortit comme une musique.

CXLIV
Une voix triste niche dans les ruines des ans.
Elle chante pour moi cette nuit:" Je t'aime."

CXLV
Le feu brûlant m'avertit par sa propre incandescence.
Sauve-moi des braises mourantes cachées dans les cendres.

CXLVI

J'ai mes étoiles dans le ciel.
Mais, oh, ma petite lampe est éteinte dans mon logis.

CXLVII
La poussière des mots défunts s'accroche à toi.
Lave ton âme avec le silence.

Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)


dimanche 13 mars 2011

Rabindranath TAGORE: Jonaki/Oiseaux Errants 126-136


CXXVI
Danse de l'eau et non coups de marteaux chantent les galets dans leur perfection.


CXXVII
Les abeilles butinent le miel des fleurs et chantonnent leurs remerciements quand elles s'en vont.
Le papillon aux couleurs criardes est sûr que ce sont les fleurs qui doivent le remercier.


CXXVIII
Etre franc est facile lorsque l'on ne dit pas toute la vérité.


CXXIX
Demande au Possible de l'Impossible, " Où est ton logis?"
" Dans les rêves de l'impotent," est la réponse.


CXXX
Si tu fermes ta prte à toute erreur, la vérité elle-aussi sera laissée dehors.


CXXXI
J'entends des choses qui bruissent derrière la tristesse de mon cœur, je ne peux pas les voir.


CXXXII
Le loisir dans son activité est travail.
Le calme de la mer roule des vagues.


CXXXIII
La feuille devient fleur quand elle aime.
La fleur devient fruit quand elle adore.


CXXXIV
Les racines sous terre ne réclament aucune récompense pour avoir rendu couvert les branches de fruits.


CXXXV
En cette soirée pluvieuse, le vent est agité.
Je regarde les branches qui s'inclinent et je médite sur la grandeur de toute chose.


CXXXVI
La tempête de minuit, comme un enfant géant éveillé dans le noir avant l'heure, a commencé à jouer et à crier.



Rabindranath TAGORE

(Version française Claude Lopez-Ginisty)